lundi 26 octobre 2009

PÉDOPHILES


LO 328 (26/10/09)
(Petite suite sur la justice, la récidive, la castration…)

L'Age de faire N° 13 (Oct 2007)
# Haro sur les pédophiles
Que veulent les Français en matière de pédophilie? Nicolas Sarkozy le sait et nous le dit, je cite : « les Français n’attendent pas de savants discours psychiatriques ou politiciens mais la mise hors circuit des pervers » fin de citation. Et comme il est président de la République, il agit. Ou plutôt, il dit qu’il va agir. Le raisonnement est simple, n’ayons pas peur des mots : les pédophiles sont des prédateurs, porteurs d’un gène pédophile, il faut les exterminer. Comme la peine de mort n’existe plus, on va les tuer symboliquement en les enfermant à vie ou en les castrant de gré ou de force. Et tout le reste n’est que littérature.
Les prédécesseurs de Nicolas Sarkozy n’ont pas fait tellement mieux mais ils avaient davantage peur des mots : s’ils avaient vraiment voulu s’engager dans une politique efficace, nous n’en serions pas à promulguer de nouvelles lois à chaque nouveau fait divers. Le Canada l’a fait en y mettant de gros moyens, et le taux de récidive y a baissé, encore que le risque zéro soit une illusion. En France, seule la répression des comportements déviants a progressé. Francis Evrard en est un bon exemple : il n’a pas tué ; or sa peine, 27 ans de prison pour deux viols, est celle qu’on risque pour un homicide volontaire. Il n’a reçu aucun soin approprié, faute de moyens dans une prison qui concentre les délinquants sexuels. Pourquoi ? Parce que la répression sèche va toujours dans le sens du souhait des victimes, en l’occurrence des parents des victimes, alors qu’il faudrait un grand courage politique pour mener des actions coûteuses, longues et peu visibles au bénéfice des seuls coupables. Ce n’est pas ainsi qu’on se fait élire ou re-élire.
Toutes sensibilités politiques ou appartenances communautaires confondues, il y a peu de sujets aussi consensuels que la stigmatisation du pédophile : le crime sexuel lorsqu’il touche un enfant est considéré comme le pire des crimes parce qu’il est sexuel. Pourtant les études montrent qu’il se pratique majoritairement en famille, tous milieux confondus alors que les parents pensent au contraire que leur enfant est en danger dès qu’il met le nez dehors. Que signifie ce consensus ? Notre société entière s’identifie à l’enfant qu’elle sacralise ; les limites entre les âges et les générations s’estompent sur tous les plans et en réaction, la demande de limite émerge : l’inceste et la pédophilie constituent une ligne rouge que personne ne conteste. C’est l’explication habituelle. Mais je voudrais avancer une autre hypothèse autrement plus dérangeante : nous avons des enfants quand nous le voulons. On peut les concevoir sans désir sexuel et même sans relation sexuelle. Le pédophile nous renvoie ce que nous ne voulons pas voir : l’enfant tant désiré est devenu désirable. Littéralement : l’objet du désir des adultes. Bien sûr, le passage à l’acte fait l’objet d’une réprobation horrifiée. Mais au fond, derrière ces cris d’effroi,
chacun se rassure : ce n’est pas lui mais l’autre qui a réalisé le fantasme qu’il s’interdit dans une société qui traque passionnément l’indécence ou la perversité. Est-ce que nous n’avons pas peur de nous-mêmes, face à ce que nous avons fait des enfants ? Comment leur garantir la chasteté des adultes qui les ont tellement désirés et à laquelle ils ont droit ? Nous ne pouvons hélas, répondre, que de la nôtre. #
Caroline Eliacheff
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Le temps des Victimes (Broché)
de Caroline Eliacheff (Psychanaliste), Daniel Soulez Larivière (Avocat)

Présentation de l'éditeur
Alors que notre société prône le culte du gagnant, la figure de la victime en est arrivée à occuper celle du héros. La médiatisation des catastrophes a révélé que l'unanimité compassionnelle était en train de devenir l'ultime expression du lien social. Et les demandes de réparation auprès des psychiatres et des juristes sont sans fin. Jusqu'où irons-nous dans cette « victimisation » généralisée ?
Caroline Eliacheff et Daniel Soulez Larivière croisent leurs expériences et leurs disciplines pour démonter et explorer ce courant qui a émergé dans les années 80 sur tous les fronts et se nourrit de l'idéal égalitaire et de l'individualisme démocratique. Ils dénoncent les dangers que nous fait courir ce primat du compassionnel et de l'émotionnel qui, parfois déjà, affecte l'intérêt des victimes et pourrait se retourner contre la société tout entière.
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"Pour un viol, le test génétique est plus fiable que l'empreinte digitale, le mec va pas se passer le bout de la bite au papier de verre." (Brève de comptoir)

Quand le droit avance, c'est la vengeance qui recule.

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Quelques réflexions (hâtives) sur la morale et la loi
Certains peuples, dits primitifs ou anhistoriques, certaines religions (le judaïsme primitif) ont établi des systèmes, des techniques sociales pour contrôler la violence individuelle, pour passer de la vengeance individuelle au droit collectif, en particulier. Des pratiques sociales, collectives, extérieures à l'individu, des mécanismes : les lois, la hiérarchie, les rituels, les sacrifices, les fêtes défoulatoires. Dans une société "primitive" pratiquant régulièrement le sacrifice d'une victime émissaire, il n'y a pas de vengeance et il n'y a pas non plus de culpabilité individuelle, elle est absorbée par le collectif, la masse, les rituels, elle est transmuée dans les mythes, mythifiée, mystifiée (voilée), il n'y a pas de Morale au sens strict, seulement une technique, pratique, pragmatique : la Loi.
D'autres (le judaïsme, suivi et amélioré par le christianisme) ont établi des systèmes de contrôle internes à l'individu : la morale, du moins sous la forme de la culpabilité (ou, pourrait-on dire : la culpabilité, d'où découle la morale). L'individu (présumé coupable) doit intégrer la Loi (venue d'ailleurs : son groupe humain, sous l'appellation de Dieu). Jusqu'à l'intégration physique : la circoncision, comme quasi-castration. (Ce qui est "coupable", c'est ce qui doit être coupé ?)
Cela entraîne que le Judaïsme/Christianisme serait à l'origine de la morale.
Et de l'individualisme.
Cela suppose aussi qu'une société qui, comme la nôtre, perd sa morale, ses principes de culpabilité, ses valeurs, comme on dit, glisserait vers un état anhistorique (primitif ? barbare ? archaïque ?).
Dans notre société "avancée", le coupable est à nouveau puni techniquement : amende, enfermement, castration chimique, bracelet gps de contrôle, …) (Je vois aussi cette perte de morale, de justice dans le fait que des avocats, souvent, négocient entre eux pour faire l'économie d'un procès : on ne passe plus par La Justice (avec Majuscule), on règle les affaires sans demander une sanction morale publique, dans le pragmatisme et le secret, avec sacrifice financier pour entériner l'accord / enterrer l'affaire.)
Comme les choses ne vont jamais en arrière, on ne peut pas parler d'une régression vers un primitivisme (si tant est que les sociétés dites primitives soient situées "avant" nous… Ne sont-elles pas nos contemporaines ?), vers un état de "pré-civilisation", mais plutôt une progression (sinon un progrès) vers un post-modernisme, une post-civilisation.
Pas de nom pour ça. Après la civilisation, QUOI ?
Doit-on nommer cela "décadence" ?



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