mardi 21 novembre 2017

ECRITURE NEUTRE



Les promoteurs de l'écriture inclusive ne vont pas assez loin. Je propose une modification beaucoup plus fondamentale de la langue française avec l'écriture neutre. J'entends par là non seulement l'idée d'instituer un genre neutre comme le fait l'anglais qui n'applique le masculin et le féminin qu'aux personnes humaines et laisse dans le neutre tout le reste, les choses (sauf les bateaux, qui sont féminins).
Mais cela même ne va pas assez loin. Il s'agit de supprimer le masculin et le féminin, de mettre TOUT au genre neutre.
Déjà, créer ce vocabulaire neutre et son orthographe neutre n'est peut-être pas simple. Essayons en essayant de justement faire simple (aller au plus simple).
Ainsi, nous allons remplacer LE et LA par LO (par exemple – j'ai essayé EL mais il y a des problèmes de prononciation).
UN et UNE par ON.
IL et ELLE par OL.
SON et SA, TON et TA, MON et MA par SO, TO, MO…
DU et DE LA par DO.
(J'ai choisi le O dans bien des cas pour essayer de produire des mots simples qui n'existent pas déjà. Sera-ce lisible et prononçable ? On verra à l'usage.)
CELUI et CELLE par CEL.
CE et CETTE par CET.
Déjà, bien des noms de choses pourraient aussi bien être féminins que masculins : un cadre pourrait aussi bien être une cadre et donc supporterait bien un neutre : on cadre. Une chaise pourrait aussi bien être un objet masculin, un chaise, donc au neutre : on chaise. J'ai choisi exprès deux mots se finissant en -e, ce qui est bien souvent le signe du féminin, mais pas toujours, comme le montre le mot cadre. On aura sans doute quelques difficultés avec des noms plus genrés dans leur écriture même : bicyclette ou moulinette, abeille ou escarcelle… Il semble que les choses masculines n'aient que rarement des marques orthographique de masculin alors que les féminines d'avantage, comme s'il fallait ajouter quelque chose au masculin pour faire du féminin : le moulinet a sa moulinette alors que la bicyclette n'a pas son bicyclet.
Pour les adjectifs, il y aura sans doute plus de problèmes que pour les noms. Problèmes parfois facilement solubles : BEAU et BELLE seront remplacé par BEL. Mais GROS et GROSSE ? À vouloir faire simple, je choisirai GROS… mais c'est retomber dans la domination du masculin. Alors GRO ? et réserver le GROS au pluriel ? De même, TOUT ou TOUTE par TOU ?

Pour tester, je prends un texte célèbre…
« Longtemps, je me suis couché de bonne heure. Parfois, à peine ma bougie éteinte, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas le temps de me dire : « Je m’endors. » Et, une demi-heure après, la pensée qu’il était temps de chercher le sommeil m’éveillait ; je voulais poser le volume que je croyais avoir encore dans les mains et souffler ma lumière ; je n’avais pas cessé en dormant de faire des réflexions sur ce que je venais de lire, mais ces réflexions avaient pris un tour un peu particulier ; il me semblait que j’étais moi-même ce dont parlait l’ouvrage : une église, un quatuor, la rivalité de François Ier et de Charles Quint. Cette croyance survivait pendant quelques secondes à mon réveil ; elle ne choquait pas ma raison mais pesait comme des écailles sur mes yeux et les empêchait de se rendre compte que le bougeoir n’était plus allumé. Puis elle commençait à me devenir inintelligible, comme après la métempsycose les pensées d’une existence antérieure ; le sujet du livre se détachait de moi, j’étais libre de m’y appliquer ou non ; aussitôt je recouvrais la vue et j’étais bien étonné de trouver autour de moi une obscurité, douce et reposante pour mes yeux, mais peut-être plus encore pour mon esprit, à qui elle apparaissait comme une chose sans cause, incompréhensible, comme une chose vraiment obscure. Je me demandais quelle heure il pouvait être ; j’entendais le sifflement des trains qui, plus ou moins éloigné, comme le chant d’un oiseau dans une forêt, relevant les distances, me décrivait l’étendue de la campagne déserte où le voyageur se hâte vers la station prochaine ; et le petit chemin qu’il suit va être gravé dans son souvenir par l’excitation qu’il doit à des lieux nouveaux, à des actes inaccoutumés, à la causerie récente et aux adieux sous la lampe étrangère qui le suivent encore dans le silence de la nuit, à la douceur prochaine du retour. »
… et je le traduis en neutre.
« Longtemps, je me suis couché de bon heur (de bonheur ?!). Parfois, à peine mo bougi éteint, mes yeux se fermaient si vite que je n’avais pas lo temps de me dire : « Je m’endors. » Et, on demi-heure après, lo penser (forme verbale neutre) qu’il (problème ! le il impersonnel de il pleut, il est temps… gardons le, pour voir) était temps de chercher lo sommeil m’éveillait ; je voulais poser lo volume que je croyais avoir encore dans les mains et souffler mo lumièr ; je n’avais pas cessé en dormant de faire des réflexions sur ça que je venais de lire, mais ces réflexions avaient pris on tour on peu particuliet (j'ai choisi ce -et final au lieu du -er masculin qui suppose sa féminisation en ère) ; il me semblait que j’étais moi-même ce (?) dont parlait l’ouvrage : on églis, on quatuor, lo rivalité de François Ier et de Charles Quint. Cet croyance (problème ?) survivait pendant quelques secondes à mo réveil ; ol ne choquait pas mo raison mais pesait comme des écails sur mes yeux et les empêchait de se rendre compte que lo bougeoir n’était plus allumé (problème : le choix de la simplicité pour l'accord mène à privilégier le masculin… ou alors il faut inventer du vraiment neuf dans les conjugaisons : allumet ?). Puis ol commençait à me devenir inintelligible, comme après lo métempsycose les pensers d’on existant (?) antérieur ; lo sujet do livre se détachait de moi, j’étais libre de m’y appliquer ou non ; aussitôt je recouvrais lo vut et j’étais bien étonné (étonnet ?) de trouver autour de moi on obscurité, dou (problème avec doux-douce…) et reposant pour mes yeux, mais peut-être plus encore pour mo esprit, à qui ol apparaissait comme on chose sans cause, incompréhensible, comme on chose vraiment obscurt (dans bien des cas, un -t final pourrait signaler le neutre en barrant la tendance à ajouter le -e féminin…). Je me demandais quod (quid ?) heure il pouvait être ; j’entendais lo sifflement des trains qui, plus ou moins éloignet, comme lo chant d’on oiseau dans on forêt, relevant les distances, me décrivait l’étendut de lo campagne désert où lo voyageut se hâte vers lo station prochaint ; et lo petit chemin qu'ol suit va être gravet dans so souvenir par l’excitation qu’ol doit à des lieux nouvos, à des actes inaccoutumets, à lo causerit récent et aux adieux sous lo lampe étranget qui lo suivent encore dans lo silence de lo nuit, à lo douceur prochain do retour. »
Conclusion : LOL !



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